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Le mur est jaune. Pas doré, pas safran, pas moutarde : jaune rage, jaune pus. Le genre de jaune qu’on gratterait avec l’ongle si c’était une idée reçue. C’est là que Renuka se cache, le dos plaqué contre la lumière, la lame encore chaude. Elle a tué. Pas métaphoriquement, pas par omission, mais littéralement, le sang comme preuve. Et elle fuit. The Shameless n’ouvre pas une intrigue, il tranche directement dans le vif. Il n’y a pas de prélude. Juste l’urgence. Et des yeux qui brillent dans la nuit, pas de larmes, de quelque chose d’autre, plus sec, plus dur : la volonté nue.
Konstantin Bojanov filme cette cavale comme on rêve d’un monde où les femmes pourraient dire non sans qu’on leur impose la géographie de leur ventre. Sa caméra flotte, parfois, souvent elle vacille, jamais elle ne trahit. Delhi devient une matrice étouffante, un labyrinthe où se croisent putes sacrées, mères piégées et jeunes mariées sous contrat. L’intrigue n’est pas linéaire, parce que la survie ne l’est jamais. On y rencontre Devika, étrange sœur d’armes, adolescente qu’on veut vendre à un homme comme on vendrait un buffet. Ensemble, elles refusent. Ensemble, elles brûlent des ponts qu’elles n’ont même pas traversés. Le suspense ici, c’est de savoir si l’espoir peut exister sans avenir.
Rien de propre dans ce récit. Les rebondissements ne sont pas faits pour surprendre, ils sont là pour gifler. Ça ne brille pas, ça crisse. L’originalité du film, c’est qu’il ne cherche jamais à être original. Il est nécessaire. Bojanov n'invente rien, il regarde bien. Et ça suffit.
La mise en scène est sobre, mais jamais minimaliste. Les cadres étouffent, les teintes brûlent. Une lumière de fin du monde éclaire chaque visage comme un aveu. Même le silence a une texture : celui du mépris religieux, celui de l’humiliation répétée. Le jeu des actrices est un uppercut. Anasuya Sengupta, solaire dans sa douleur, compose une Renuka complexe, digne, même dans l’errance. Sa bouche tremble, mais ses gestes tranchent net.
La musique ne commente pas, elle hante. Des nappes lentes, des percussions rares, comme un cœur trop prudent. Chaque son est un rappel : tu n’es pas en sécurité. Nulle part. Même ici. Même maintenant.
Et pourtant, on pleure. De rage, peut-être. Ou d’un espoir crasseux qui survit malgré tout. The Shameless est une brûlure lente. Une claque sans bruit. Un cri étranglé de cinéma.
Note : 14/20.
Public : celles et ceux qui veulent voir un film qui n'excuse rien.